L’expression de l’affect dans les échanges des apprenants de FLE

Ingrid Gómez Sánchez

Escuela de Lenguas Modernas

Escuela de Formación Docente

Universidad de Costa Rica

Résumé

Dans cet article, nous étudierons l’expression de l’affect dans les échanges des apprenants de Français langue étrangère (FLE) afin de mieux comprendre l’expression des sentiments dans le processus de communication.

Mots clés : affect, échanges, langue française, communication, sentiments, société.

Resumen

En este artículo, estudiaremos la expresión de afecto en los intercambios del alumnado de Francés Lengua Extranjera (FLE) con el fin de tener una mejor comprensión de la expresión de los sentimientos en el proceso de comunicación.

Palabras claves: afecto, intercambios, idioma francés, comunicación, sentimientos, sociedad

Introduction

S’il est vrai, la personne faisant partie d’une société quelconque, n’est pas un individu passif. Son comportement et sa façon d’être sont définis par ses relations avec les autres à travers le moyen d’interaction qu’est le langage. Dans ce processus de communication, l’expression des sentiments joue un rôle très important dans les échanges entre les différents sujets.

Ainsi, la société exerce une action indirecte sur les sentiments et les passions, alors l'homme en tant qu’être social, c’est quelqu’un qui raisonne, qui pense, tout en qui éprouvant des émotions et des sentiments envers son prochain. Nos émotions sont soumises à une véritable discipline sociale, du fait qu’en présence des événements d’un certain genre et dans telles circonstances qui se produisent souvent, c’est la société qui nous indique elle-même comment nous devons agir. Ou plutôt il ne s’agit pas seulement de la façon dont nous devons exprimer nos sentiments, mais du sentiment et de l’émotion elle-même. On pourrait ainsi dire que chaque société, nation, culture et époque met sa marque sur la sensibilité de ses membres.

Suivant les idées précédemment exposées, l’intérêt de cet article est basé sur une observation d’un cours de FLE et sur une enquête appliquée aux étudiants ERASMUS (niveau C1), lors de nos études à l’IRFFLE. Le sujet principal a été « l’amour », et la date du 14 février, nous a servi comme un bon prétexte pour inciter notre public à mieux exprimer son avis.

Dans un premier temps, nous allons expliquer les préalables théoriques de notre recherche. Ensuite, nous
présenterons l’institution, le public et le corpus sur lequel est basée cette étude. Finalement, nous ferons une analyse des productions écrites des étudiants pour repérer l’expression de l’affect et les valeurs qui ressortent de leurs travaux.

L’affect dans la langue : étude
linguistique des affects

On entend par affects les états et procès de perception, sensation, émotion, etc., qu’expriment des phrases affectives. C’est-à-dire, les affects renvoient à tout état affectif (émotionnel sentimental) qui peut être soit pénible, soit agréable et qui peut être qualifié (ex : amour, haine, colère, honte, culpabilité …) mais qui est parfois ambigu. Ces affects se présentent sous la forme d’une décharge ou d’un état général. Ainsi, ces types d’interactions verbales font partie des objets d’étude qui se situent à l’interface du culturel et de la linguistique, de la compétence pragmatique et de la compétence sémantique.

Or, l’étude linguistique des affects inclut l’expression des actes de langage, les modalités affectives et les connecteurs discursifs affectifs surtout dans le cadre d’approches interactionnistes, qui s’intéressent aux phénomènes de variations interculturelles. Ceci est dû au fait que les comportements émotifs varient d’une culture à l’autre. À ce propos, Kerbrat-Orecchioni affirme que les approches interculturelles mettent en évidence que les différentes sociétés n’utilisent pas les mêmes répertoires de signes pour exprimer leurs émotions.

Finalement, il est important de signaler les structures qui n’appartiennent pas au champ des affects : les qualités. Pour illustrer ceci, nous proposons les exemples suivants par rapport à notre sujet principal pour introduire notre analyse : « Jean est un amoureux » et « Jean est amoureux ». Nous remarquons que seul le second de ces énoncés exprime un affect, tandis que le premier exprime une caractéristique, et illustre donc le type attributif, s’opposant au type affectif que le second illustre.

L’importance de l’affect en classe de FLE

L’expression linguistique des affects dans les interactions verbales est un domaine de recherche important pour la didactique des langues étrangères car :

L’activité de communication des utilisateurs / apprenants est non seulement affectée par leurs connaissances, leur compréhension et leurs aptitudes mais aussi, par des facteurs personnels liés à leur personnalité propre et caractérisés par les attitudes, les motivations, les valeurs, les croyances et les types de personnalité qui constituent leur identité. (CECRL, 2005)

Dans ce contexte, les noms des sentiments et des émotions sont des constructions sociales plus ou moins bien définies et persistantes, qui nous aident à tracer et à délimiter à la fois, les frontières du soi et de la société. Il s’agit de la compétence « existentielle » ou du « savoir être ». Cette compétence est importante, car la dimension affective atteint tous les aspects de notre existence et, de manière très directe, ce qui se passe dans la salle de classe, y compris celle de langues étrangères (Arnold, 2006 :408).

Ainsi, selon Underhill, l’enseignant de la classe de langue est un « facilitateur » qui non seulement connaît la langue et la méthodologie d’enseignement, mais qui sait aussi « créer un climat psychologique positif pour un apprentissage de grande qualité. À ce propos, Barbier et Galatanu défendent que :

La donation de significations à une situation ou à une activité, y compris par un signal émotionnel, est un ressort essentiel de l’apprentissage. De ce fait, l’essentiel de la tâche de l’enseignant consisterait à faire découvrir le sens à l’apprenant. (2000 : 78, 79)

L’amour sous le point de vue des affects

Etant donné que le classement des émotions et des affects est un travail difficile, nous allons essayer d’aborder le sujet de l’amour sur le point de vue de l’expression des affects, sans négliger évidemment, des aspects concernant l’analyse pragmatique du mot en question.

Grossmann et Tutin (cités par Ounis, 2009) caractérisent les noms d’affects d’un point de vue syntaxique, par leur combinaison avec les verbes support avoir, ressentir, éprouver et le nom un sentiment de ; ainsi, le nom joie peut être considéré comme un nom d’affect étant donné qu’il cumule les deux possibilités éprouver de la joie et un sentiment de joie. Par contre, le nom échec qui permet seulement un sentiment d’échec et non éprouver de l’échec ne rentre pas dans cette catégorie.

Il est aussi important de distinguer la différence entre un nom de sentiment et un nom d’émotion. Ounis, dans son article « De la distinction entre nom d’émotion et nom de sentiment : coup de foudre et amour », remarque que ces deux notions se différencient principalement par la propriété, selon laquelle, les noms des émotions ne portent pas sur un objet déterminé ; alors que les noms de sentiments en ont un. Ainsi l’amour se définit comme un nom de sentiment alors que la joie est un nom d’émotion.

Nous considérons indispensable baser notre sujet sur sept catégories d’affects dont l’expression linguistique est disponible, nous avons choisi des catégories travaillées dans un cours de pragmatique :

  1. Perceptions : ex. « voir », « entendre ».
  2. Sensations, états physiologiques : ex. « rougir », « s’exciter », « pleurer », etc.
  3. Émotions et sentiments : ex. « avoir peur », « être amoureux », « avoir honte », etc.
  4. Processus cognitifs : ex. « admirer », « espérer », « croire », « imaginer », etc.
  5. Nécessité, possibilité : ex. « devoir », « pouvoir ».
  6. Possession : ex. « avoir », « suffire », « manquer », etc.
  7. Occurrence : ex. « se produire », « recevoir », « attendre », etc.
  8. Mais l’amour… c’est quoi ?

Qui que ce soit, l’être humain aura toujours besoin d’amour. Peu importe la culture ou l’âge, donner et recevoir de l’amour fait partie de la construction sociale d’un individu. Cependant, pour certains, donner la définition de l’amour, pourrait représenter quelque chose de très simple. Pour les autres, cela peut signifier une réflexion
profonde qui nécessiterait du temps pour pouvoir l’exprimer.

Donc, essayer de donner une définition unique du mot « amour » ne nous semble pas pertinent, puisque ce serait entrer dans le domaine d’une opinion affective très subjective. Même des philosophes et des penseurs ont tenté, depuis des siècles, de connaître le mystère de l’amour pour mieux le comprendre sans arriver à obtenir une idée claire et objective de ce mot.

Globalement, nous pourrions décrire l’amour comme un sentiment d’affection ou d’attachement envers une personne ou par rapport à une chose. Ce sentiment pousse quelqu’un à adopter un comportement particulier. Selon le dictionnaire le Petit Robert 2011, l’amour constitue l’attachement à quelqu’un (Dieu, le prochain, l’humanité, la patrie), l’expression de la tendresse entre les membres d’une famille ou bien l’inclination envers une personne, le plus souvent au caractère passionnel.

Cependant, ce mot peut aussi faire référence à une large variété de significations, grâce à sa pluralité, voilà pourquoi nous allons noter dans cet article, les types d’amour d’après les Grecs pour centrer ensuite notre étude, sur une seule représentation : l’amour de couple. Ainsi, pour la Grèce Antique, l’amour est défini sous quatre noms différents tels que : éros (l’amour érotique), philia (l’amitié), agape (l’amour du prochain, la charité) et storgê (l’amour familial). Nous allons donc centrer notre intérêt notamment sur l’amour éros.

L’éros désigne, de façon générale, l’expression d’un sentiment d’attirance sexuelle entre deux personnes. À différence de l’amour « agape » qui signifie « aimer », l’éros correspond plutôt à être amoureux. Toutefois, dans les textes antiques, ce n’est que le mot éros qui est utilisé en ce qui concerne les relations humaines, mais il y a aussi un éros pour la musique, la philosophie et l’art.

Pour les Grecs, le dieu éros était l’un des premiers dieux qui assurait aux hommes la vertu et la prospérité. Son pouvoir était immense, et personne, ni dieu, ni homme, ne pouvait lui résister. On le considérait aussi dangereux parce qu’il faisait perdre la raison.

Le contexte

Dans le cadre de l’analyse de cet article, nous avons fait une observation d’un groupe d’étudiants ERASMUS (niveau C 1) à l’IRFFLE (Institut de Recherche et de Formation en Français Langue Etrangère). Ce sont des étudiants étrangers en échange avec l’Université de Nantes, qui doivent suivre des cours en langue française.

Ce centre d’études a été créé en 2003 et il répond aux besoins de la nouvelle organisation politique et culturelle de l’Europe. Ainsi, avec la création de l’Union Européenne, le Conseil de l’Europe propose le CECRL (Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues) comme réponse à son objectif de parvenir à une plus grande unité parmi ses membres et atteindre ce but par l’adoption d’une démarche commune dans le domaine culturel. En effet, toutes ses formations en FLE ont comme référence ce nouveau cadre ; en ce qui concerne les cours de français pour les étudiants étrangers, ils sont organisés selon des niveaux tels que : élémentaires (DELF) A1 et A2, intermédiaires (DELF) B1 et B2, et avancés (DALF) C1 et C2).

Le public

Nous avons observé un groupe d’étudiants ERASMUS. Ce sont des étudiants en échange, qui ont déjà obtenu un niveau d’études supérieur à celui du baccalauréat et qui suivent des cours à l’IRFFLE, dans le but de continuer une formation à l’Université.

Concernant leur degré de connaissances en langue française, ils sont situés dans un groupe d’étudiants ayant le niveau C1. À ce propos, il faut considérer qu’à ce niveau-ci, l’apprenant est capable :

[…] d’ écrire des textes bien structurés sur des sujets complexes, en soulignant les points pertinents, les plus saillants et en confirmant un point de vue de manière élaborée par l’intégration d’arguments secondaires, de justifications et d’exemples pertinents pour parvenir à une conclusion appropriée ». (CECRL, p. 51)

Étant donné que le nombre d’étudiants était nombreux lors du jour de notre observation (27 au total), nous avons tenu compte de trois aspects différents pour mieux organiser les données par rapport à notre public (la nationalité, l’âge et le niveau de langue). Le public observé, se situe entre 23 et 43 ans du niveau C1. Il s’agit d’un groupe d’étudiants de différentes nationalités, dont la quantité a été mise entre la parenthèses de la façon suivante :

Le corpus

Pour l’élaboration de cette étude, nous avons appliqué une enquête, afin de faire une analyse sur les affects et les valeurs mobilisées concernant le sujet de l’amour. Ainsi, nous avons choisi trois productions écrites différentes parmi le groupe d’étudiants, à la suite des questions posées telles que :

L’analyse du corpus : les modalités affectives et les valeurs modales

L’analyse de notre corpus est basée sur deux critères importants à considérer : les modalités affectives et les valeurs modales selon le tableau des valeurs de Galatanu (2000).

Les modalités affectives (favorables ou défavorables)

Ces modalités concernent des adjectifs et des adverbes, mais aussi des verbes tels que : des verbes de sentiments qui expriment une disposition, favorable ou défavorable, de l’agent du procès vis-à-vis de son sujet. Ainsi que des verbes locutoires : ce sont des verbes qui dénotent un comportement de parole, et que domine l’archilexème « dire ».

L’approche sémantique des modalités

Selon Galatanu, la modalisation discursive représente l’inscription dans l’énoncé, par une marque linguistique (formes modales), de l’attitude (valeur modale dans le discours) du sujet communiquant à l’égard du contenu propositionnel de son énoncé et de la fonction que cet énoncé est censé avoir dans l’interaction verbale à laquelle il participe (Galatanu, 2000).

Il est aussi important de définir les concepts de base concernant l’attitude du sujet parlant inscrite aussi bien dans la langue que dans l’analyse du discours, est appelée « modalisation » mais dans la théorie linguistique des modalités, c’est celui de « modalité ».

Dans le cadre de la sémantique argumentative, la modalité correspond à la forme linguistique mobilisée pour exprimer et marquer cette attitude ou valeur modale, comme le résultat linguistiquement marqué du processus de modalisation.

Nous allons maintenant procéder à l’analyse des marques d’affects et de l’inscription de la subjectivité dans des productions écrites des étudiants de Français langue étrangère. Réussissent-ils à exprimer ce qu’ils ressentent ? De quelle manière le font-ils ?

Production écrite nº1 : Étudiante roumaine, 21 ans.

  1. « Je crois que c’est la même chose que pour les autres nationalités.
  2. un très beau sentiment, l’anxiété de voir l’autre personne, de faire de
  3. petites choses pour la faire (…), de pouvoir parler franchement de
  4. n’importe quoi, de partager les bonnes choses et les mauvaises.
  5. Ce qui est plus spécifique pour les français, je pense que c’est la passion,
  6. ils sont très compliqués dans les relations, et plus attentifs aux petits détails. (Réponse nº1)
  7. Pour moi, l’amour à la française c’est plus romantique que l’amour
  8. dans les autres cultures, car les français sont plutôt (…). Je crois qu’il
  9. y a une conception vieille pour l’amour à la française, d’être plus
  10. sentimentale, passionnel et romantique, mais je ne suis pas sûre
  11. qu’on peut dire la même chose dans nos jours. Je pense que c’est
  12. plutôt une question de personnalité de chacun et (non) pas de
  13. nationalité ». (Réponse nº2)

Analyse

Nous observons à la ligne 1 la phrase « je crois » qui est un verbe introductoire d’un discours explicite avec une valeur épistémique, de probabilité dans la réalisation du dictum.

Ensuite la ligne 2, nous montre l’adjectif « beau » avec une valeur esthétique positive qui présente un état affectif de beauté. À la même ligne, nous trouvons le nom « anxiété » à la base une valeur négative, mais dans ce contexte avec un état affectif positif.

À la ligne 3, nous voyons l’adjectif au pluriel « petites » qui contient une valeur affective inhérente montrant un état affectif de tendresse. À la même ligne, le verbe locutoire « faire » exprime une obligation (valeur déontique). L’expression verbale « de pouvoir », à la même ligne, est une construction impersonnelle, qui marque la possibilité « d’être capable de » avec une valeur déontique. L’adverbe « franchement » est utilisé avec une valeur affective d’honnête et de liberté à la base, sous une valeur pragmatique.

Après à la ligne 4, nous avons la présence de deux adjectifs : « bonnes » avec une modalité affective rétrospective, avec une valeur esthétique positive chargée de subjectivité et « mauvaises » (modalité affective) avec une valeur esthétique négative. Aux lignes 9 et 10, les adjectifs « sentimentale », « passionnel » et « romantique » montrent un état affectif positif avec des valeurs axiologiques positives.

À la ligne 5, nous pouvons observer la construcion « je pense » (verbe illocutoire du type assertif) qui vient du verbe modalisant « affirmer ». Il contient une valeur doxologique qui présente une remarquable subjectivité. Plus loin, à la ligne 6, l’adjectif au pluriel « compliqués » contient une valeur axiologique présentant une charge de l’état affectif de mépris. À la même ligne, nous voyons l’adjectif au pluriel « petits » qui montre une forte dose de subjectivité, avec un état affectif positif de plaisir. À la cinquième ligne l’adjectif au pluriel « compliqués » marque une valeur axiologique dévoilant une charge d’état affectif de mépris à la base. De plus, à la même ligne, l’adjectif au pluriel « petits » est aussi chargé de subjectivité avec un état affectif de plaisir.

Puis, nous remarquons que l’adjectif « classique » est chargé d’un état affectif d’expression de vieillesse. Nous voyons en même temps, l’occurrence du verbe locutoire « croire » avec un discours de tolérance présentant une alternative possible (« je crois », donc c’est possible). L’adjectif féminin « vieille » est chargé d’un état affectif de mépris.

Production écrite nº2 : Étudiante espagnole, 26 ans.

  1. « Je pense que l’amour pour tous les français sera comme l’amour
  2. pour le reste du monde : trouver une personne avec qui tu veux
  3. partager ta vie, faire de choses avec lui ou elle, aussi une personne
  4. qui tombe amoureuse d’autre a une admiration pour elle et elle a un
  5. grand intérêt de savoir tout ce qu’il y a autour la personne qui aime. (Réponse nº1)
  6. Peut-être que l’amour à la française est un amour très exagéré dans
  7. lequel le couple fait beaucoup de démonstrations d’amour très
  8. typiques comme faire un repas avec la lumière des bougies, avec la
  9. musique très romantique, avec beaucoup de câlins, de bisous et tout
  10. ça » (Réponse n°2)

Analyse

D’abord, l’utilisation du pronom « je » marque la prise de position de la narratrice sur le sujet dont elle s’exprime. Cela veut dire qu’elle est d’accord avec l’idée qu’elle propose. Elle confirme cette idée avec l’utilisation du verbe « penser ».

L’emploi du futur avec le verbe « être » dans « l’amour à la française sera comme pour le reste du monde… » fait allusion à une incertitude.
Ceci, parce qu’elle devrait utiliser le présent. Ce fait nous laisse supposer que dans sa langue maternelle, elle utilise le futur pour comparer deux choses mais sans être vraiment sûr.

La phrase « le reste du monde » inscrit des tierces personnes. Elle généralise sa proposition comme acceptable pour autrui.

À la ligne 4, nous trouvons l’adjectif « admiration » qui sert à renforcer la définition de « l’amour pour les Français ». De plus, il y a l’adjectif « grand » qui dénote le degré d’importance que la narratrice pense que les Français accordent à ce sentiment dans leur vie.

Dans la réponse 2, il s’agit d’une définition de « l’amour à la française »; dans ce cas, le sujet énonciateur utilise l’expression « peut-être » qui désigne une incertitude, car elle n’est pas sûre de sa définition concernant ce sujet. À la première ligne, nous trouvons l’adjectif « exagéré » qui est renforcé par l’adverbe « très » pour montrer que « l’amour à la française » possède un coté négative dès son point de vue. Cela se confirme avec les phrases « très romantique », « très typique » pour indiquer une démesure de ce qui est vraiment l’amour pour elle.

En ce qui concerne l’évaluation du contenu propositionnel pour constater la subjectivité du discours, nous avons les résultats ci-dessous :

Tout d’abord, nous avons identifié deux axes de degré de l’objectivation et de la subjectivation qui évaluent à la fois les formes modales et les valeurs modales. Au premier axe, il s’agit d’un mécanise discursif d’explicitation de l’objectivation. Ainsi, dans les valeurs aléthiques, nous trouvons l’étiquette nominale « ta vie » associée à la signification de l’amour comme étant un engagement de deux personnes pour toute leur existence.

Quant aux valeurs déontiques, nous apercevons plusieurs marques modales comme « les Français », « des bisous », « des câlins », « la musique ». Celles-ci sont des étiquettes nominales qui montrent les caractéristiques faisant partie de la définition de l’amour à la française et l’amour pour les français, pour la personne enquêtée.

La locution verbale « doit savoir », aléthique/épistémique, dénote la connaissance qu’un Français est censé avoir, pour entrer dans la définition que le sujet énonciateur propose sur cet exemple.

Au deuxième axe, il s’agit d’un mécanisme discursif d’opacité de la subjectivation. Cet axe est le plus représentatif avec des valeurs axiologiques. Ainsi, nous trouvons des étiquettes nominales de valeur affective comme « amour », « couple », « admiration », « intérêt ». De même, nous remarquons des verbes affectifs comme « tomber amoureux », « aimer », « partager » et « trouver ». Finalement, les qualifiants de noms comme « exagéré », « romantique » et « typique » sont modifiés par des adverbes comme « très » et « beaucoup », montrant une reconstruction de la signification de l’amour pour la narratrice.

Production écrite nº3 : Étudiante italienne, 24 ans.

  1. « Je pense que l’amour est universel, il y a des manifestations différentes
  2. d’amour mais c’est toujours amour. L’amour à la française est très proche à
  3. la même idée que j’ai comme italienne, je trouve une seule différence, peut-
  4. être que les italiens extériorisent plus ses sentiments, mais je ne connais pas
  5. assez des français par avoir une opinion objective, et extérioriser l’amour ne
  6. veut pas dire que l’amour est plus profonde. (Réponse nº1)
  7. Je crois que je pourrais m’exprimer mais peut-être difficile à l’exprimer à
  8. parole, mais les mots ne sont pas toujours nécessaire pour exprimer les
  9. propres sentiments à l’autre personne. La langue n’est pas très importante,
  10. je l’ai déjà vu, il y a des choses plus importantes pour une couple, des
  11. autres affinités. » (Réponse nº2)

Analyse

Dans ce dernier extrait, nous remarquons une intervention évidente du sujet parlant par rapport au contenu de l’énoncé. Ainsi, la pensée modale peut se rapporter à la connaissance que le sujet d`énonciation a des choses et des phénomènes, dans ce cas de modalités épistémiques.

À la première ligne, le verbe « penser » est du type assertif et provient du verbe modalisant « affirmer » qui présente une valeur doxologique modifiant le dictum. Le nom « amour », axiologiquement positif, tient un état affectif positif. Ensuite, le mot « universel » est un adjectif qui contient une valeur ontologique avec un état affectif de généralisation.

À la même ligne, nous voyons l’expression « il y a » qui montre l’acte de constater le dictum. L’expression « manifestations différentes » contient une valeur hédonique affective, l’adjectif au pluriel « différentes » démontre une modalité affective rétrospective. À la ligne suivante, le mot « amour » est un nom qui contient une charge d’état affectif sous une valeur axiologique affective positive. La conjonction « mais » marque le contraste entre deux idées et l’expression « très proche » montre un état affectif d’égalité.

Nous observons aussi à la ligne 7, la formule la construction « je crois » qui emploi un verbe introductoire d’un discours explicite présentant une valeur épistémique, de probabilité de la réalisation du dictum. De même, nous avons situé le verbe pouvoir dans la production écrite de l’étudiante italienne comme un marqueur de la possibilité interne « être capable de », « en état de », avec une valeur de type aléthique.

Enfin, nous pouvons dire que le discours de cette étudiante est subjectif et qu’il existe des marques des états affectifs. Néanmoins, nous constatons que son niveau sémantique n’est pas encore achevé et son expression écrite reste dans les formules syntaxiques.

Conclusion

Dans ce travail, nous avons abordé une brève analyse des expressions associées à l’amour dans les échanges d’un cours avec des étudiants de plusieurs nationalités.

L’étude réalisée, nous a permis d’identifier les modalités affectives et les valeurs modales marqueurs de l’affect. Pour mieux fonder notre analyse concernant l’expression de l’affect dans leur discours, tous les classements, les recherches et les ouvrages évoqués dans la bibliographie, nous ont servi pour interpréter l’information donnée par les apprenants.

Or, en nous fondant sur les productions originales des étudiants, nous avons remarqué que l’amour comme sujet de discussion, exprime des états psychologiques qui se manifestent, c’est-à-dire, se matérialisent, aux yeux de l’observateur. Le nom amour désigne, ainsi, un certain état dans lequel on est, affectivement, par rapport à une autre personne (l’on aime).

D’un point de vue didactique, nous croyons que si l’enseignant donnait la possibilité à l’apprenant d’entrer dans ces structures spécifiques de sa production écrite et d’apprendre à les manipuler, alors, ce dernier serait à même de développer ses propres compétences d’expression écrite. Cela consiste à donner aux apprenants, en plus d’un savoir lexical, une compétence qui leur permettra de prendre en main leur savoir, afin qu’ils puissent manipuler la langue selon les modalisations employées. Un tel enseignement tend à développer des savoir-faire plus que des savoirs isolés : dès l’instant que l’apprenant saisit les règles, alors il peut les manipuler dans toutes les situations de communication.

Enfin, nous commençons à comprendre comment construire un enseignement du sens des mots pour les expressions associées aux affects et nous souhaiterions associer cet enseignement à celui de savoir-faire linguistiques dans notre expérience en tant qu’enseignants de FLE.

Bibliographie

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Plantin, C., Doury, M., et Traverso, V. (Eds.) (2000). Les émotions dans les interactions. Lyon : Presses Universitaires de Lyon.

Recepción: 21-10-16 Aceptación: 13-09-17